dijous, 15 de febrer del 2024

Des traces du gascon dans la formation de l'espagnol ?

 J'ai déjà exprimé mon étonnement devant l'idée que le gascon puisse avoir arrété sa progression de long de la  côte cantabrique à Saint Sébastien. En effet, il n'y a pas de Garonne pour empêcher son expansion vers l'ouest le long de la côte nord espagnole. On a dit que le gascon avait été apporté à Saint Sébastien par une colonisation au 12eme siècle. Qu'il y ait eu apport d'immigrants, ça, on le sait. Mais rien ne dit qu'ils étaient gascons ni que cet apport ait été nécessaire pour y apporter le gascon. Et j'en doute.  D'autant que les noms médiévaux repérés comme "gascons" par notre archiviste donostiarrak Serapio Múgica ne le sont pas vraiment. (de) Beurepaire,  (de) Paeget,  (de) Manx, sont des noms étrangers, certes, mais certainement pas gascons, contrairement à ce que pensait don Serapio qui n'était pas linguiste et ignorait tout du gascon. Beaurepaire, (Le) Mans, (Le) Péaget, ces toponymes sont bien français mais n'ont évidemment rien de gascon.   Que ce soient les ancêtres de ces gents de Saint Sébastien qui y aient apportés le gascon est exclu. Dans tous les noms constituant l'onomastique de Saint Sébastien repérée comme gasconne par Múgica , un seul peut se prétendre candidat: de la Mayson. Ce n'est pas franchement très convaincant.  On peut alors supposer que le gascon y était indigène et je pense qu'il l'était bien, d'une certaine manière.  

Car on y lit des choses intéressantes dans le fascicule de Serapio Múgica intitulé Los Gascones en Guipúzcoa. Par exemple, cette anecdote:  des Hendayais ont voulu se faire construire une tour-palais  sur la rive de la Bidassoa, on est en 1518. c'était la mode à l'époque, ce qui avait pour effet d'entrainer des rivalités voire des conflits meurtriers entre familles rivales, à savoir qui l'avait la plus monumentale ou la plus belle, on en connait des exemples très célèbres dans notre région, je pense en particulier aux Velasco et aux Salazar dans la vallée du Mena, à une petite cinquantaine de km de Bilbao dans le piémont cantabrique versant atlantique. La tour-palais hendayaise n'était pas du du genre pour plaire à ceux de Fontarrabie qui ont voulu la détruire à coup de canons. Plaintes, jugement avec des représentants des deux pays. En quelle langue,ont-ils échangé, croyez-vous ? En basque? en espagnol? en français? Mais non. Les Hendayais qui peuvent se construire des Tours-Palais sur la rive de la Bidassoa sont de la noblesse et la langue de la noblesse basque, au nord, à toujours été le gascon autant qu'on puisse remonter le temps. Leurs noms de famille sont à cent pour cent basques car ils sont basques et non gascons et le lieu de leur "Ostau" (maison en gascon, casa solariega ou casa solar en espagnol) est un toponyme basque.  Leur nom de famille  est le nom de "l'Oustau" : Johan de Odornoz, Per(o) de Bessassari, Marticòt de Agorreta, ce sont eux, les "Gascons". Ils parlent gascon mais sont basques. Les représentants des deux Etats ont autorisés que le procès se fasse entièrement en gascon et que le compte-rendu s'y fasse dans cette langue, constatant qu'elle était commune et la seule correctement pratiquée par les deux parties. L'État français était représenté par le premier conseiller du parlement de Bordeaux, que le procès se fasse en gascon devait bien l'arranger. Pour le représentant de l'État espagnol, c'est moins sûr, il s'appelait d'Acosta (sic), un galicien sans doute.  Le procès et les actes se sont faits entièrement en gascon. Hélas le document original a disparu dans un incendie à Fontarrabie.  Mais on en a tout de même une version conservée dans un autre fond, la traduction espagnole du jugement accompagnée des témoignages en gascon des deux parties, qui, elles, n'ont pas été traduites. Mais revenons à notre sujet. 

On considère que le castillan s'est formé du côté méditerranéen de la cordillère cantabrique, en Cantabrie elle-même  et dans la région castillane proche de cette dernière. On est à 150 km de Portus Victoriae Iuliobrigensium (aujourd'hui Santander) et surtout de l'autre côté de la cordillère . Et de surcroit, la formation de l'espagnol est relativement tardive. On ne voit pas bien alors ce qui aurait pu freiner le gascon (déjà formé en 600) dans sa progression  vers le sud de l'Aquitaine puis vers l'ouest sur la côte cantabrique, jusqu'à la rencontre avec l'astur-léonais qui , lui, progressait vers l'est. Il ne s'agit pas  là forcément d'une langue rurale au début, surtout au Pays Basque, bien sûr, mais au moins d'un roman parlé dans les ports, commme autrefois à Saint Sébastien, Ciboure et Saint Jean-de-Luz, car le roman est nécessaire pour le commerce. On ne commerce pas aisément avec les voisins Cantabres, Asturiens, Galiciens, Gascons, voire Saintonjeais, Poitevins et Bretons en ne parlant que basque. Le roman procure là un avantage économique et c'est un motif suffisant pour changer de langue après une phase de bilingüisme. Il suffit de quelques générations, très peu, en fait. Et que ce roman portuaire soit relativement unifié au Pays Basque espagnol par rapport à celui de France me semble normal, C'est le contraire qui eut été une anomalie: c'était les même gens et il n'y avait pas de frontière. Et je dirai même, pas seulement au Pays Basque, jusqu'en Cantabrie. Il ne m'a pas échappé qu'à Santander débouche le rio "Pas" (et non Paso) et que pour dire nous sommes, vous êtes,  les parlers de Cantabrie (et ceux d'Extramadure qui en sont issus par la Reconquista)  disent "semos, seis" quand l'asturien et le castillan disent "somos, sois". Se pourrait-il qu'on ait là une trace de cet occitano-roman que l'espagnol, pourtant très soucieux du "bien parler" et de correction, voire d'hyper-correction, n'a pas jugé bon d'effacer ? Ou il n'y est simplement pas arrivé.

 En Biscaye, le toponyme Balmaseda, dans les Encartaciones,  à 30 km de Bilbao, ne s'explique pas vraiment par le castillan. Si le premier élément est roman (Bal), le deuxième doit l'être aussi, selon toute vraisemblance. Le gascon nous suggère maseda, tranquille (mase-t, -da  <mansuetus-a) mais si ça va pour un animal ou une personne , pour une vallée, c'est plutôt étrange et finalement pas très crédible.  Ah mais attention! En espagnol c'est Valmaceda avec une "ceta". Maceda: alors on peut  y voir un cognat du portugais macedo: pommeraie. Maceda est aussi une ville en Galice, ce sont les cognat des toponymes catalans Maçanet, Maçaneda, ce dernier également occitan: Massanède en toponymie officielle. Manzaneda en castillan (très commun en Cantabrie). Le mot espagnol manzana pour pomme se disait autrefois maçana comme  en  oc. et en cat. (latin martiana). Il y aurait donc bien eu perte du n intervocalique dans le toponyme biscayen, on aboutit justement à la même solution que le galaïco-portugais, c'est logique . On rentre alors parfaitement dans la phonétique du gascon.  On me dit que maceda pourrait être basque, mahatsieta, lieu de vignoble. Mais le mot, ici,  fait bien partie d'un syntagme. Il se réfère à Bal/Val et là on est dans le roman, un syntagme romano-basque, c'est suspect.  Je ne crois pas à cette solution pour cette raison.  Remarquons qu'un ruisseau à Guétary s'appelle Baldareta. Ça m'a l'air d'être le même roman: Val d'Areta. C'est le même Bal. Mais là, il est suivi effectivement par un mot basque mais précédé de "de", exactement comme dans Val d'Aran. On n'est pas dans le même cas avec Valmaceda.  Ce dernier toponyme doit résulter d'une perte d'un  "n" intervocalique (Valmaçaneda > Valmaceda), ce qui révelerait une couche toponymique romane pré-castillane, du type gascon ou apparenté. Ce n'est pas du tout absurde et c'est ce qu'il faut chercher à éprouver. 

 Une sorte de gascon ne peut-il pas aussi faire le lien entre le mot castillan becerra et le latin vitella? La première personne du verbe ser en espagnol: soy, ne pourrait-elle pas être aussi un héritage du gascon ? On ne voit pas bien la relation entre le latin sum et l'espagnol soy, sauf si sum >son > soy et cette mutation n final >y  est bien caractéristique du gascon côtier. Comparons ben > bei (bey) en gascon côtier avec ben > bién en castillan. On aurait avec "soy" un gasconisme fondamental en espagnol et aussi en occitan occidental. L'occitan a siau et son, soi semble bien être un gasconisme en occitan . Le français disait sui, peut-être par analogie avec fui qui est est la forme du passé, mais dans le cas de sui, la prononciation n'est pas diphtonguée, notre "suis" en dérive. Le portugais dit sou, il aurait perdu le n, c'est assez normal, et ce "ou" est-ce une diphtongue? Ce n'est pas sûr cf. louco (<loco < loca < clocca). . A part le roussillonais  qui a conservé som prononcé [sun] et aussi en baléare : som, le catalan standard a rajouté à so ce -c sans doute par analogie avec tinc ou tenc (tenir), vinc o venc (venir) (c'est la finale normale des verbes dans des parlers septentrionaux de transition du catalan du côté de Besalú cantoc = je chante). Le cantabre dit bien soy. L'asturien hésite entre so (la forme portugaise) et soy (la forme espagnole). L'asturien oriental, appelé aussi cantabre occidental, lui, ne semble  pas vouloir prendre partie. Il dit... "ero" (je suis).   La forme "soy" en espagnol est très étonnante  à moins qu'il y ait du gascon dans l'air comme pour Valmaceda.. Et bien sûr, une trace importantissime  du gascon en castillan serait le traitement du f latin qu'on retrouve en cantabre (qu'on admet généralement ne pas être de substrat basque, lui, mais indo-européen si non celtique)  et seulement dans ces deux-là dans la péninisule. En première analyse, le traitement du "f" latin a l'air distinct en espagnol par rapport au gascon.  Mais quand on fouille un peu, le constat change: le traitement était exactement le même en espagnol populaire qu'en gascon, c'est à cette conclusion qu'est arrivé Frank Jodl qui a étudié l'affaire de près : Estigma y auge de prestigio: El cambio f > h en castellano y gascón visto desde la sociolingüística histórica y la lingüística variacional Revista de Filología Románica (2015) 32-1 21-40. La possibilité d'une forme de gascon de la còte cantabrique qui aurait été un substrat du castillan avant  le 8ème siecle pour être finalement remplacé par le castillan est une question qui mérite qu'on s'y intéresse, à mon avis, car elle est assez logique. L'aire f/h du gascon et du castillan sont en continuité par le versant atlantique de la cordillère cantabrique. Le gascon étant une langue  pratiquée au Pays Basque nord, pourquoi ne l'aurait-elle pas été au Pays Basque sud? Pourquoi et par quoi aurait-elle été arrétée à part le castillan? Le basque n'est pas incompatible avec le roman, le gascon a cohabité avec le basque pendant au moins sept siècles au Guipuscoa et au Pays Basque du nord, en admettant que le gascon n'y soit pas dérivé du latin sur place comme ailleurs en Gascogne, ce qu'il est impossible de prouver ni dans un sens, ni dans l'autre.   C'était les mêmes gens de chaque côté de la Bidassoa, on voit mal un roman distinct pour les uns et pour les autres, du moins avant la "descente" du castillan arrivé de l'autre côté de la cordillère et avant l'établissement des Etats médiévaux. Une analyse toponymique attentive devrait être effectuée en Cantabrie et au Pays Basque. Le castillan a l'habitude de corriger les toponymes de manière systématique, on le voit avec les toponymes basques d'origine latine, les versions espagnoles sont systématiquement corrigées par rapport aux versions basques. Mais il pourrait arriver qu'il y ait des oublis, par exemple le mot juen (font-) fait bien partie de la toponymie cantabre en composition (notez qu'on le trouve aussi dans la toponymie alto-aragonaise de Huesca alors que l'aragonais conserve le -f-  en toute position, juen est  donc bien là-bas un vieux gasconisme probable hont > juen, le castillan a fuen, pas juen) alors que le castillan dit fuente (mais fuen en composition toponymique, l'hypothèse d'un gasconisme n'a jamais été évoquée dans ce cas mais il faudrait le faire et l'éprouver), voilà ce genre d'indices qu'il faut recolter et assembler et analyser car "juen" est évidement compatible avec un plus ancien  "hont".  "Maceda" en est un autre exemple. La recherche de la perte du n est un bon indice.  Il peut aussi arriver qu'il y ait des mauvaises corrections, c'est ce qu'il faut rechercher. La toponymie donnera des réponses. 


 PS. Notez les formes verbales en vieux castillan  coñoçuda, movudo, (aujourd'hui on dirait conocida, movido), ces terminaisons en -udo, -uda, celà ne vous rappelle rien? (manuscrit de Miranda del Ebro, 1268). Il est vrai que l'apport gascon n'est pas nécessairement ancien, ici. En effet, ils pouvaient faire partie des "francos" "recrutés" pour repeupler la zone, précisemment à cette époque. Il y avait aussi des Basques qui ont laissé d'importantes traces toponymiques près de Miranda, dont on a un exemple ici (Potançuri). On notera aussi  que le dit Lop Díaç a un prénom bien gascon. Et gascon, le scribe pouvait l'être aussi. On trouve aussi ces formes en -udo -uda dans  des textes médiévaux (XIII)  rédigés en asturien assez bancal, supposés traduits du latin ou rédigés  par des francos d'origine gasconne ou occitane. Voici le texte de  Miranda del Ebro:

Coñoçuda cosa sea a todos los omnes que esta carta vieren cómo, sobre pleito que fue movudo entre Juan Sánchez, escudero de Lop Díaç, por sí e por sos ermanos de la una part, e el concejo de Miranda de la otra part, que demandava Juan Sánchez al concejo sobredicho casas e heredades en Morcuera, que es aldea de Miranda, e molinos e parrales e exidos en Potançuri, e dizieron el concejo de Miranda que lo non avía aver. 

Source: https://cuadernos.cilengua.es/index.php/cilengua/article/view/24



diumenge, 24 de desembre del 2023

L'afixe "-òt" despreciatiu e/o augmentatiu en gascon. E de quauques gasconismes comunament ignorats.

En occitan, l'afixe -òt qu'ei diminutiu, sovent dab ua nuança afectiva. En gascon aqueste afixe qu'ac pòt estar tanben, qu'ei lo cas mei generau: Joanòt, gojatòt, praubòt etc . Totun, n'ac ei pas tostemps, que pòt estar a còps augmentatiu e sovent despreciatiu, en seguir l'usatge espanhòu de -ot(e) qui s'arretròba en catalan tanben. 

Per exemple: "que plau a chorròt" (fr. il pleut des cordes), "qu'ei un planhòt" ( que's planh hèra) (Coromines, El parlar de la Vall d'Aran p. 240 § 144d). Autanplan qu'avem lo mot "sarrot"qui significa" "ua gran quantitat". "Sarròt" qu'ei ua fòrma afixada de "sarro" (s.m.)( cf. sàrrou: petite gibecière de berger in Palay), etimon probable eusk zorro, id. ). En aqueste darrèr exemple, que cau mercar la nuança despreciativa aportada per l'afixe -òt qu'ei absenta en gascon , n'i ei pas sonque l'augmentativa.

L'exemple de caishalòt (cachalot) qu'ei especiau. "Cachalut" (en grafia alibertina: "caishalut", fòrma afixada de caishau, lit. provedit de caishaus, dentut), qu'èra lo mot tà designar lo "cauerat" ( fr. cachalot) en parlar de Sent Joan de Luz a la prumèra mieitat deu sègle 17, "caishalut" per "cauerat" que ns'i ei atestat en 1628 (cf. cachalot CNRTL). Caishalut > caishalòt ( (lit. caishau petit) per confusion. Caishalòt" per "cauerat" qu'ei atestat en parlar de Sent Joan de Luz dejà en 1694. Lo mot "caishalòt" qu'ei sovent, a gran tòrt, considerat com a gallicisme quan, en realitat, qu'ei un beròi gasconisme, generaument non sabut com a tau. Coromine, qui ignorava l'atestacion lusiana de 1628, que volè har derivar lo mot "cachalote" d'un mot ipotetic portugués *cacholote qui lo lingüista catalan e s'inventè entà l'ocasion, totun shens absoludament nat supòrt documentari. O mei exactamanet, lo mot cacholote qu'existeish plan mes n'a pas arren a véder dab l'étimon supausat cachola ni cachalot. Cacholote que vien de l'anglés chocolate e que designa espècias d'ausèths au Brasiu. En realitat, las duas atestacions mei ancianas deu mot que son plan de la còsta deu Bascoat Nòrd e que son d'idiòma gascon, cachalut ( = caishalut, 1628) e cachalot ( = caishalòt, 1694) . Los dus mots que hèn sens : de fèit, lo cauerat qu'a dents gròs mentre las balèias veritablas n'an pas sonque barbas. L'atestacion mei anciana deu mot "cachalote" en portugués qu'ei hòrt mei tardiva, ne remonta pas sonque tà la dusau mieitat deu sègle 19. N'ei pas "cachalut" ("caishalut") qui deriva de "cachalote", qu'ei "cachalote" qui deriva de "caishalòt" e aqueste de "caishalut".

De la medisha manèra, lo mot gascon "avalut" (fòrma masculinizada e sinonima d' "avaluda", "valuda", mot assimilat a ua fòrma verbau per confusion < lat. "voluta") qu'ei a l'origina d'"avalòt" (movements convergents de horrèras viengudas de direccions divèrsas de cap a un punt unic de trobada, segon la definicion de Palay). En catalan, aqueste mot "avalot" qu'a la medisha significacion d'agitacion populara, d'aplec tumultuós. En gascon montanhòu, lo mot "arbaròt" qu'a la significacion de susmauta. Aqueste mot "arbaròt" qu'ei especific deu gascon montanhòu segon Palay. Qu'ei possiblament ua fòrma deformada deu mot avalòt: avalòt> avaròt >avarota (iper-correcion < devarar ) >avarotar> arvarotar . O que deriva de l'espanhòu alborote (susmauta.) > arbaròt (avalòt x arborote).

Aquesta fòrma montanhòla gascona, qu'arretrobam adaptada en castelhan : gasc. avalòt > gasc. arbaròt > esp. alborote > esp. alboroto.  Coromines que volè har derivar lo mot catalan "avalot" deu vèrbe "avalotar" e aqueste deu vèrbe latin "avolutare" variante de volutare. Totun, aquesta ipotèsi n'ei pas crededera. De fèit, l'ipotèsi de Coromines qu'implicaré la conservacion deu "t" intervocalic deu vèrbe latin "volutare" en "avolotar" quan, normaument, aqueste "t" latin auré de vàder "d". Per aquesta rason, lo vèrbe catalan "avalotar" non deu pas derivar deu vèrbe latin "volutare". D'aulhors, aqueste darrèr que s'arretròba en occitan e en catalan rosselhonés devath la fòrma absoludament canonica "voludar", dab lo "d" tau com esperat aquiu. En realitat, l'origina deu mot catalan "avalot" que deu estar lo quite mot gascon (avalòt) qui deriva d' avalut per un procèssus de cambiament d'afixe. Lo mot gascon avaluda qu'ei conservat en parlar catalan de L'Escala (Empurdan) dab la significacion de brut, de rumor, d'agitacion sonòra. La preséncia deu t hens lo mot gascon avalut ne resulta pas de la conservacion deu t latin deu vèrbe volutare, que provien de la masculinizacion artificiau d'avaluda, atau :

volutare > voludar > (la) valuda, (l') avaluda (s.f.) > avalut (s.m.) > avalòt) com dejà vist mei haut.

E la seguida que sec :

avalòt -> *avaròt (iper-correccion) > avarotar (v.) > arbarotar (atraccion de la protesi frequentativa gascona ar-)> arbaròt

avalòt, avalotar passats au catalan, 

arbaròt passat au castelhan arbaròt > arborote > arboroto (id.), arborotar

Un aute exemple d'aqueste emplec augmentatiu e despreciatiu deu nòste afixe qu'ei "barròt" (fr. gros bâton, gourdin), abarrotar : fr. frapper avec un gourdin ou à coups de bâton (significacion distinta de la deu v. "abarrotar" en castelhan e en catalan). En gascon, lo mot "baston" que pòt designar "la litière du bétail" (de "basta": friche, bruyère, herbe de friche; etimon: eusk baso = bòsc, terrenh non cultivat; basati = sauvatge, non cultivat, *basata > basta, barta) et bastoar que significa "adobar lo baston" (préparer, arranger la litière, cf. Palay) (e non pas "abarrotar", oc. "bastonar"). Entà evitar la confusion enter los dus mots "baston", lo gascon que s'estima mei emplegar "barròt" e "abarrotar" per "baston" e "bastonar" en occitan. 

Entà acabar, que podem mentàver lo mot "arlòt", d'etimologia generaument non compresa peus filològues per ignorància deu gascon, com a l'acostumat, "Arlòt" qu'ei la fòrma despreciativa e augmentativa d"'arla", l'insècte guastador deus teishuts (arla < *harlana : eusk. har = vèrmi, cuc; lat. lana). Deu vèrbe "arlar" (guastar lo teishut) que deriva lo substantiu "arlant" (pilhard, sacamand, arlòt) e lo vèrbe derivat "arlandejar" (sacamandejar). Deu substantiu "arla" que deriva per afixacion augmentativa e despreciativa "arlòt" (1-arlant, sacamand, pilhard, 2-òmi de mala vita, macarèu). Lo mot "arlòt" , dongas de formacion gascona, que s'arretròba en totas las lengas europèas occidentaus devath fòrmas mei o mensh adaptadas. La preséncia de la "h" a la debuta deu mot en quauques lengas com lo francés e l'anglés que deu miralhar la prononciacion anciana deu mot en gascon, qui ei de fèit l'etimologica.   En catalan balear, lo mot que s'a perduda la significacion despreciativa e que significa simplament "gojat" (fr. garçon) (escriut e prononciat al.lot, (= allòt) qui ei la prononciacion deu mot en gascon landés tanben). Arlòt que hè partida de la lista d'aqueths gasconismes generaument ignorats, com cachalot, tornada (tornade) e d'autes.

dilluns, 2 d’octubre del 2023

Un punt de sintaxi: (au)tant com; tant qui/que )

 Un aute punt qui’s pòt senhalar (que n’i auré un sarròt!), qu’ei lo d’un torn com tant qui volhas. Un dia, que credoi aver ua allucinacion quan constatèi qu’en un tèxte men, que l’avèn corregit en tant com volhas! Lo corrector, praube coneishedor deu gascon e gran lingüista autoproclamat, n’èra pas capable de compréner qu’ací ne s’agiva pas de comparèr, mes d’intensitat. Aqueth cas (ua excepcion a la règla qui exigeish com après tant) qu’ei totun senhalat per Boset dens la soa Syntaxe:

Pren-te’n (au)tant com volhas.
Que pòdes parlar tant qui (quevolhas, ne cambiarèi pas d’idea.





Aquesta nuança d'usatge  correcte o non enter "(au)tant com" e "tant qui/que" non m'a pas pareishut tan clara en aqueste textòt deu praube E. Gonzalès. Alavètz qu'èi volut consultar la "Syntaxe Béarnaise et Gasconne" de J. Boset (Jean Bouset) qui lo quite Gonzalès e cita, tà sajar de compréner quin  s'explica l'ahar. 

Aquiu qu'avetz çò qui i escriu J. Boset (p. 60, §113).

§113 - Comparatives :
Nous avons déjà signalé (cf. § 60) que le complément d'un comparatif d'égalité se construisait avec la conjonction coum :

N'ey pas ta bèth coum credí.        Il n'est pas si beau que je le croyais
Autant mort coum s'ère au segrat Aussi mort que s'il était au cimetière

                (I. Salles, l'ours)

Néanmoins si le verbe du complément a un caractère hypothètique, on emploie qui de préférence a coum. Ex. :

Autà lèu qui sias tournat            Aussitôt que tu seras revenu 
Que-u te harèy tan gran qui pousqui.    Je te le ferai aussi grand que je pourrai                                                 
...ta beroy qui boulhas               Aussi beau que tu voudras
Per ta hort qui sia                       Si fort qu'il soit
.
..tant qui poudí  
tant com poudí , etc                                ...tant que je pouvais, etc




dilluns, 11 de setembre del 2023

L' òrre "quitament".

En la lenga escriuta deu microcòsme occitanista de Gasconha, e especiaument de Bearn, que i a mòdas mei o mens passadissas. Atau que n’ei de l’òrre quitament(qui Alibèrt ne cita pas, qu’ac cau mentàver), jamei emplegat abans la fin de las annadas 1990 e totun, estranhament e escandalosament consacrat peu diccionari de Per Noste, e de la locucion conjontiva quitament se. Atau que n’ei de mantun(s), -ua(s), determinant indefinit qui existeish (ja que ne s’emplegue pas guaire mei en la lenga parlada deus locutors natius), mes dont l’emplec ei limitat. Au lòc de’s demandar : « Vam, quin disen, o quin disèn non i guaire, entà rénder la medisha idea que lo francés “plusieurs” ? Quin disen, o quin disèn, dab la medisha nuança semantica que lo francés “même” ? », e de har enquèstas sistematicas dens los tèxtes escriuts e oraus, tot l’occitanisme gascon, dab la manca d’ambicion qui’u caracteriza, e davantejat –çò qui ei enqüèra mei grèu– peus lexicografes, que causí la simplificacion abusiva (mantun), o la mèrra invencion lingüistica (quitament ne’s deu pas emplegar hòra de las frasas negativas : Ne l’èi pas quitament espiat ; en Bearn que disem meilèu :Ne l’èi pas solament espiat)."  (Eric Gonzalès, blòg "dia per dia" messatge deu 25/05/2016  ). 

Totun, Palay (1934) que nse'n balha la definicion qui segueish : "quitimén, quitomén (G.); adv. Pas même; comme si; également; même. N'a pas quitimén poudùt parlà, il n'a pas même pu dire une parole. Y èro quitomén lou drònle, il y avait également l'enfant; il y avait même l'enfant. "

Qu'ac cau plan arreconéisher, se los catalans an "fins, fins i tot, i tot, àdhuc,  incloent-hi ...", los gascons n'èm pas tant arrics de locucions entà arrevirar lo mot francés "même". Se abandonam l'emplec deu mot "quitament",  qué'nse demora?  Malaja, a la question qui eth medish e pausè: "Quin disen, o quin disèn, dab la medisha nuança semantica que lo francés “même” ? » lo praube mèste que'nse deishè shens responsa. La responsa, totun, que la sabem: que disèn meme o mema. Un francesisme, qué. 

EDIT: Ved.  lo comentari deu Halip, un aute mèste, qui testimònia de l'emplec de "quitament" en gascon de la còsta. N'avem pas nada rason entà espudir aqueste mot. Que supausi lo praube Eric Gonzalés ne s'èra pas avisat que i avè duas entradas au Palay: quitement E quitiment, quitoment, dab significacions distintas. 

dimecres, 30 d’agost del 2023

Mandre, mandra, (renard) mandrin (l'utís) : ua ipotèsi etimologica celtista (etimon *màdara).

E sabetz lo mot "mandre, mandra" tà díser renard? Un mot enigmatic. D'après Wartburg que seré un derivat deu latin "marfur" qui designa ua pèça d'un torn; Totun que cau plan díser la relation de "marfur" dab la mandra, qui'n sia fonetica o semantica, n'ei pas evidenta. Wartburg que supausa la relation semantica que vieneré deu fèit que lo "membre" deu renard èra, d'autescòps, utilizat com a principi actiu d'ua preparacion destinada a curar l'impoténcia sexuau , d'aquiu lo nom de "mandre" balhat au renard. Benlèu, bon. Totun, passar de "marfur" a "membre" o "mandre" qu'ei hòrt complicat, çò qui hè l'ipotèsi de Wartburg pòc crededera. 

Ua auta ipotèsi tà explicar lo mot mandra qu'arreliga lo mot occitan au mot catalan mandra qui significa peresa, cf. esp. "mandría": sin valor, inútil ( < it. mandra: cort < grec màndra: monastèri, crampeta de monge). Totun, lo mot en catalan n'a pas briga la significacion de "renard" e lo mot en occitan n'a pas beròi la significacion de "peresa". N'a pas sonque la significacion de renard e la de finòt.  N'ei pas tant evident que s'agesca deu medish mot. N'ei pas impossible tanpòc. Qu'èra l'ipotèsi dehenuda per J. Coromines (ved. zorro in Br. dic. etim. l. castellana)
 

Ua tresau 'ipotèsi qu'arreliga lo mot occitan "mandre", "mandra" au mot irlandés "madra" qui significa "can" e qui ei a l'origina de mei d'un sintagma en irlandés com  "madra rua" = renard (lit. can arroi); "madra allaidh" = lop, lit. can sauvatge; "madra mara" : fòca, lit. can (de) mar; "madra uisce" : loira: lit. can (d')aiga; "madra cainn" = esquiró lit. can d'arbo (sic). Autanplan en guallés que i trobam: "(hwn) madog" : renard : lit. (can) qui tanh au "mad" (madog < madāko-, aqueste sufixe guallés og qu'ei l'exacte cognat deu nòste -ac, -òc < -āko- ); autanplan qu'avem (hwn) madyn : renard , lit. (can) - "mad" petit (*madino >madyn). Aqueste mot "mad" qu'arrepresenta hòrt probablament "mat" qui vòu díser o(r)s. Mat que deriva deu mot deu proto-celtic "matu-" qui a duas significacions se ne son  pas dus mots distints: bon (l'adjectiu) e os (fr. ours). Madog qu'ei d'auhors un petit nom en guallés, dab la significacion de "caritadós", "ben.hasent." (< madāko, de matu- = bon) . Lo mot irlandés "madra" (var. "madara") que vien de l'irlandés ancian "maddar" o "mattar" , possiblament derivat d'ua fòrma afixada d'aqueste mot "matu-" (os").  Aqueste mot "matu" que figura au diccionari de lenga galesa de X. Delamarre, l'etimon qu'ei probablement arrepresentat com a a nom de persona en galés e en galo-latin Matugenus etc). 


En tot cas, l'ipotèsi celtista que supausa ua derivacion d'un mot celtic *màdara tà har "mandra" en occitan, derivacion hòrt mei simpla que non la qui partiré deu mot latin "marfur". Lo mot "mandrin" (id. en francés, manlhevat de l'occitan, lo mot qu'a viatjat: cat. mandri, esp. mandril) que vieneré deu medish etimon. La relacion semantica qui arreliga lo mot "mandrin" au mot "mandre, -a" (renard) que seré similara a la qui existeish en francés enter lo mot "goupillon" e lo mot "goupil".

diumenge, 27 d’agost del 2023

Un mot gascon viatjaire: fonilh

 Bordèu qu'a hèit deu vin un ahar gascon. E lo comèrci deu vin bordalés que permetó lo viatge de mei d'un mot especificament gascon com "barrica", "barril -barriu", etc. Uei que'm vòli interessar au mot "honilh" (dautescòps "efonilh", "enfonilh", fr. entonnoir), qu'ei "fonilh" deu costat de Bordèu. Non, l'etimon n'ei pas celtic, qu'ei lo mot latin "infundibulum". Lo mot que s'arretròba a l' occitan vesin "fonilh", "enfonilh" etc. La simplificacion nd > n que signa un gasconisme . Lo mot "fonilh" que viatgè dab las barricas de vin: los Espanhòus e los Portugués que manlhevèn lo mot (arag.- esp. "fonil" , port. "funil", id.), los Bretons tanben (breton miejan: founilh, breton d'uei: foulin) e los Guallés tanben (fyllen). Se no'm credetz pas quand afirmi lo mot qu'ei d'origina gascona, qu'espèri que crederatz lo FEW qui ac ditz tot egau . Ved. infundibulum, FEW 4, 682.

(publicat a la paja "En gascon" de fb, lo 26 d'agost de 2023)

dimarts, 22 d’agost del 2023

Pourquoi sorelh au lieu de solelh en gascon?

Le gascon a un mot bien à lui pour dire "soleil," qui est "so" (aussi graphié "sou") (< lat. "sole-") alors que l'occitan dit "solelh" (< "soliculus", forme affixée de "sol- solis"). Le mot occitan a diffusé en gascon, où il a du être faussement pris pour une forme affixée du mot gascon  "so", comme "cabelh"  l'a été pour cap (l'étymon latin "capitulus" signifie "petite tête" et par métaphore "épi", en gascon "cabelh" signifie bien "épi" mais aussi "extrémité", "cime de végétal" et même "grosse tête" car pris pour une forme affixée de "cap", sans valeur diminutive).  Donc "solelh" a été pris pour un dérivé de "so". Or il n'y a pas de trace de "l" dans ce mot "so". Le mot solelh a donc été hypercorrigé  en "sorelh", le mot "so" étant faussement rangé dans la liste des mots comme "flo(r)" (fleur), "amo(r)" (amour), "sò(r)" (sœur) dont les dérivés affixés font réapparaître le "r", donc "sorelh" comme "soreta" e "sorilheta" (fr. sœurette). Cette hypercorrection  est fréquente mais elle ne concerne néanmoins pas tous les parlers gascons. 

dissabte, 19 d’agost del 2023

Proto-celtique mello= ballon > gascon meron (meroû, meroun) : melon.

  *Mello- "lump",  "ball" (Celtic lexicon). En breton, mell veut dire gros ballon. Voilà un étymon celtique qui a du ou pu être à l'origine du mot français melon en dépit de l'étymologie proposée dans tous les bons ouvrages. Le mot melon est en effet supposé dériver du latin tardif *mēlo  qui serait une abbréviation du mot du latin classique melopepo -nis  (melon) lui-même adapté du grec. Néanmoins,  la  forme du mot spécifique au gascon est meron  (meroû, meroun),  ce qui pointe vers un étymon  "mello-" avec deux "l" et non pas  avec un seul. En occitan comme en français, le double l intervocalique du latin est simplifié en l simple, on ne peut donc choisir  entre une forme *melo et une forme *mello, elles  aboutiraient à exactement le même résultat dans ces deux langues. Ce n'est pas le cas en gascon, le double l intervocalique du latin y donne régulièrement un r et non un l.  Le " r" intervocalique du mot meron  en gascon nous incite donc à 'identifier  l' étymon comme étant *mello avec  les deux l que l'on retrouve par ailleurs dans le mot italien: mellone. L'étymon serait donc alors le mot celtique mello "ballon" , (aussi colline, tête,) passé en  latin tardif, où le mot a pris le sens de "melon", par métaphore et  sans doute confusion d'étymon. Les formes espagnole, catalane et portugaise melón, meló et melaõ pourraient être le résultat du voyage du mot occitan ou français. Il y a du avoir confusion entre le mot celto-latin tardif *mellone- (du celtique mello: ballon) et le mot greco-latin classique melopepone- (melon), ce dernier ayant été décomposé en "melon pépon" (cf. moyen français "melon ponpon" FEW mēlo 6-1 683). 


divendres, 18 d’agost del 2023

*turi (tour, tertre, colline) > turon et al., tuc, tuca, tuhet, tuquet.

 *Turi* tour (Celtic Lexicon) L'étymon proto-celtique "turi" signifie tour. Tour en irlandais se dit tor (<turi-),  torr en gaélique écossais. Dans ces langues, le sens est plus large que juste "tour" : château, tertre, colline arrondie. Gallois: twr, ancien gallois tor: tour, colline,tertre,  tas.  En gallois contemporain, le mot twr a le sens de colline, comme turon en gascon. On tient là probablement les cognats celtiques des mots gascons, turon et  turròc qui signifient: éminence, tertre, motte. 

La question de l'étymologie du mot "tuc" et sa relation avec l'étymon celtique *turi est posée. Le FEW nous propose un mot *tūkka,"cucurbitacée"  dans une langue inconnue de méditerranée occidentale (FEW 13,2 398). Cette étymologie n'est pas sans poser problème. Le mot "tuc" ne désigne aucune plante en gascon et, contrairement au languedocien qui a les deux formes "suc" et "tuc"  pour dire sommet (en occitan: suc, tuc = sommet, tuca = courge, cf. italien zucca, courge), le gascon ne connait que tuc-a avec les significations associées à l'étymon turi- dans les langues néoceltiques . Il est difficile d'admettre que le mot italien zucca (courge) et le gascon tuc puissent être cognats.  L'hypothèse d'une origine "indigène" pour ce mot tuc -a, typiquement  même si non exclusivement gascon, merite qu'on s'y intéresse. 

 En effet, la forme non affixée tu(r) (<*turu-) pourrait être à l'origine du mot gascon tuc,  adaptaté populairement à l'aide du suffixe gascon -uc, -uca  :   *tu(r)  > *tuüc , -a-> tuc, tuca , éminence, dune, tertre, tas, sommet,   pour cette constuction, il  y a pu avoir attraction du synonyme gascon de turon:  cruc, cruca (étymon celtique krukkā).  En faveur de cette dérivation est l'existence de cet autre mot "tuhet" qui signifie nuque et qui, avec cette signication, est synonyme de "tuquet" (nuque). On peut proposer la séquence suivante: *tu(r) s.m. > tua  s.f. > tuha (h épenthétique, euphonique) >  tuhet (suffixation) > tuhe (dégression).  

Même si l'hypothèse proposée par Wartburg constitue une alternative évidemment recevable, il m'apparait néanmoins vraisemblable que l'étymon du mot italien zucca  soit différent de celui du mot gascon tuc pour des raisons d'abord phonétiques. Il s'agirait plutôt  de  deux étymons distincts qui aurait voyagé, l'un (tuc < tur-) venant de la côte ouest de la Gascogne,  l'autre ( suc <zukka) venant d'Italie . Les deux se seraient croisés et confondus dans leur domaine partagé, à l'est de la Gascogne  (zucca: courge en italien, tuc: tertre, colline; sommet en gascon, suc, tuc :sommet en occitan, tuca: courge en languedocien).  Le mot  "tuc" semble avoir en effet voyagé à la fois dans le domaine occitan et dans le domaine catalan pyrénéen voisin du gascon (Pallars et Ribagorça, tuc = pic, cim). Le mot a pu aussi s'enraciner en asturien (tucu: protubérance dure, cf. FEW 13,2 398), un emprunt au gascon  possible.  

 En gascon, on note une confusion  de l'étymon *turu- avec tufus (cf. tuha :ensemble d'arbres sur une éminence)  et  un croisement du même étymon avec terra (d'où tarròc = turròc). En résumé, l'étymon "gaulois" "turra" inventé dans FEW 13,2  p.433, pour expliquer turon est une erreur. La forme est bien turi- selon les spécialistes du proto-celtique , et il se pourrait donc  fort bien que le mot "tuc""-a"  (mot voyageur) en dérive par une affixation  triviale en gascon avec le suffixe -uc, -a à partir de la forme non affixée   *turu >*tu(r) > tuc. De même, l'affixation de *tu(r) avec -et a pu conduire à "tuhet". 

 

dijous, 3 d’agost del 2023

Etym. balano: balaguèr, balaguèra:ussi: balen,balens balia, baliva, balejar, baleja: un gasconisme médiéval en français :balai, balayer.

*Balano- <banatlo- (genêt, balai). *balano- est .la forme gauloise (cf. Delamarre, Dic. Gaul., Matasović, E.D.P-C), c'est une forme métathésique du mot proto-celtique *banatlo; les langues néoceltiques ont gardé la forme originelle. Ce mot celtique a un double sens : genêt d'une part, et balai de l'autre car le balai à l'origine se faisait avec des brins de genêt (cf. le mot anglais broom qui a le même double sens).

En gascon, le mot gaulois *balano a dérivé de différentes manières:. Le mot balen (*balano > *baleno > balen /baleŋcognat du mot vx-f rançais balain (balai), lyonnais balan. désigne un sorte de râteau qui sert à ratisser et ramasser les feuilles. Il est aussi utilisé au féminin (*balena > balia) avec le même sens. Le "e" de balen suggère un changement d'accentuation dans l'évolution du mot (bàlanu- /'balǝnu/ -> balénu), comparable à celui qui a affecté le mot "bálano" en castillan (bálano > balano) d'étymon distint. Une autre forme du mot" balen" au féminin est aussi employée pour désigner une clôture en roseaux, en brandes, en genêts servant à protéger du vent : baliva (Bayonne) , balua, baluva (< *balia < balena ), d'où le verbe baluvar, balivar : clôturer etc. Il est vraisemblable que le mot gascon "balen" a du signifier "balai" autrefois, c'est la signification de l'étymon. On dit parfois que le verbe gascon "balejar" aussi graphié "baleyà" (fr. balayer) est un gallicisme, or sa construction en gascon à partir du mot "balen" apparait tout-à-fait régulière: (balen (s.m)> *bale(n)ejar / *bale(n)eyà (v.) >balejar /baleyà (fr. balayer) > baleja /baleye (s.f;, fr. balai). En revanche, il est très compliqué de faire dériver le mot français "balayer" de "balain" et de l'étymon *balano . La perte du "n" en position intervocalique est une caractéristique du gascon, elle n'est pas française. On observe cette perte de la nasale de l'étimon balano dans les mots "balayer" et "balai", ce qui permet de soupçonner un très vieux gasconisme déjà présent en latin médiéval dans le Livre Rouge de Chartres (1280) sous la forme "balez" (balais) qui pourrait représenter notre mot gascon "balens" ("balens" se prononce /ba'les/ en gascon). De même, on trouve en vieux-français le mot "balei" qui est une forme typiquement gasconne, pouvant soit représenter le mot gascon balen prononcé à la mode bayonnaise et landaise ( baley /ba 'lœj/) soit le déverbal masculin du verbe baleyà (baley /balei), en gascon baleye /baleja (s.f.) /. C'est donc plutôt le mot français "balayer" qui est un gasconisme (gascon "baleyà") et non le mot gascon qui est un gallicisme. La forme gasconne prise par le mot "balano", s'est généralisée en gallo-roman (voir FEW 1, 232 banatlo).

Reconnu du même étymon est le mot balaguèr, balaguèra (toponymiquement et anciennement: ensemble ou tas de genêts, et encore aujourd'hui en gascon: vent du sud, p.-ê. parce qu'il fait voler les feuilles, il balaye). Ce mot pourrait dériver de la forme suffixée en āko de balano :  *balano > *balanāko -> *bala(n)ac -> balac -> balaguèr-a (dérivé affixé de *balac). Dans ce cas, l'absence de "n" dans ces mots romans signe un gasconisme passé en catalan en espagnol. L'accentuation des mots catalan "bàlec" et espagnol "bálago" pose question. Elle pourrait être artificielle, inventée par dégression de balaguer-o (gros tas de genêts) > cat. bàlec = genêt, esp. balaguero (gros tas de paille) > esp. bálago (paille), peut-être par attraction du cast. bálano. Une autre hypothèse pour expliquer l'absence du "n" de balano dans balaguer est celle d'une dégression illégitime du mot gaulois balano affixée avec -ako, donc un changement de ce qui peut sonner comme un affixe. bàlano > bàlako donc en catalan /'balək/ au lieu de */'balən/. En faveur de cette hypothèse est la forme "bale" ou "bala" qu signifie genêt en capcinois, tandis que "baleguer" y signifie lieu où poussent les genêts. . Cette hypothèse d'une dégression a l'avantage de concilier la forme gasconne balen (< bàlan = bàlen /'balən/) et catalane bàlec. Dans cette deuxième hypothèse, l'origine gauloise de l'étymon balano (pour banatlo) plaide à lui-seul en faveur d'un leg du gascon aux langues péninsulaires. Une origine celtibère n'est pas très vraisemblable à cause de l'ordre des consonnes qui est b-l comme en gaulois alors que l'ordre est b- n dans l'étymon proto-celtique.